Au revoir Neowise, bonjour tristesse !
Observer le ciel la nuit, c’est aussi regarder où on met ses pieds !

 Une communication à la presse par Roger HELLOT, Président de la Fédération des Associations d’Astronomes Amateurs d’Alsace.

La comète Neowise tire petit à petit sa révérence et s’éloigne inexorablement de la Terre en emportant son panache jaune au liseré bleu vers d’autres horizons. En effet, elle n’est plus que visible dans des jumelles et le grand public, après un engouement sans pareil depuis longtemps, se détourne déjà vers d’autres sujets qui font le buzz.

Mais les astronomes amateurs restent un peu sur leur faim !

Roger Hellot, le président de la fédération des associations d’astronomes amateurs d’Alsace se réjouissait au printemps, en rendant, dès le début du confinement, le public attentif à la beauté du soleil couchant qui laissait la place à la planète Vénus dans le ciel du soir. « Nous ne nous attendions pas à l’arrivée d’une belle comète pour fêter le déconfinement. Neowise F3 fût une des plus belles comètes des 20 dernières années »., rajoute-t-il a ses commentaires. Malheureusement, les vrais astronomes amateurs ont vite déchanté devant l’engouement médiatique dont s’est emparée la toile. A force d’une surenchère de photos de la comète comme panache des cathédrales jusqu’à l’église du village ou du château du coin, les badauds se sont précipités vers la campagne à peine la nuit tombée pour saisir, eux aussi avec la fierté de leur smartphone la traine de l’astre errant. « Mais à force de regarder le ciel, ils ont oublié de regarder où ils mettaient leur pieds », regrette Roger Hellot qui souligne que les astronomes amateurs utilisent par contre des zones aménagées quand ils se rendent dans la campagne, notamment le massif vosgien pour profiter d’un ciel plus noir, abrité des lumières parasites de l’éclairage public. Ils se sont aussi, pour certains, spécialisés dans la spectroscopie et ont cherché à étudier la composition de la comète, ses mouvements de rotation et son évolution. Ils ont regretté les débordements d’un public qui s’est lâché à réaliser chacun sa photo personnelle avec force de piétinement de l’espace naturel, des plantes sauvages rares et des plantes fragiles.

L’absence des êtres humains dans la nature pendant le confinement avait permis à la nature de retrouver bien des aises, une constatation bien vite oubliée. L’Office National des Forêts, avec Didier Epp, le responsable pôle aménagement-environnement à l’agence de Schirmeck, s’est également plaint du mépris des promeneurs nocturnes, de leurs stationnements sauvages, des barbecues et de leurs non-respects autour de la zone Natura 2000. Rappelons que des plantes comme les laiches sont devenues très rares, que le merle et le pipit nichent sur le sol, ou encore que les chiroptères, les tritons et les salamandres sont en voie de disparition. Les astronomes amateurs sont très proches des techniciens et des professionnels de la protection de la nature, ne serait-ce que par leur préoccupation commune de la préservation du ciel et de l’environnement nocturnes. Le départ de la comète a donc laissé un goût amer et les astronomes amateurs s’interrogent aujourd’hui sur leur ardeur à communiquer et à vouloir partager la contemplation des beautés du ciel nocturne.

« A force de lever le nez au ciel, il ne faudrait pas oublier où l’on met les pieds ! », renchérit Roger Hellot, « Notre planète est elle-aussi unique, file avec nous à travers l’espace comme un grand jardin dont nous ne pourrons pas nous échapper alors que son atmosphère, les plantes et les animaux sont déjà menacés. N’oublions pas que dans ce grand jeu de massacre, nous ne sortirons pas vainqueur sans un grand respect mutuel ».

En partageant leurs soucis avec l’ONF et les Brigades Vertes, les astronomes amateurs lancent donc un appel solennel : Respectons la nature à nos pieds autant que le ciel au-dessus de notre tête pour ne pas rester avec un goût de tristesse lors de notre adieu à Néowise.